L’agriculture multifonctionnelle : fonctions et reconnaissance en France

L'agriculture multifonctionnelle est un modèle agricole qui intègre plusieurs dimensions : production alimentaire, préservation de l'environnement, dynamisation des territoires ruraux et maintien du patrimoine culturel. Cette approche complète est apparue dans les années 1990 pour répondre aux attentes sociétales en matière d'agriculture durable.
A retenirUne installation photovoltaïque sur une exploitation agricole permet de réaliser jusqu'à 80 000 euros d'économies, illustrant la rentabilité de la diversification énergétique pour les agriculteurs français.

Définition et concept de l'agriculture multifonctionnelle

Définition et concept de l'agriculture multifonctionnelle
L'agriculture multifonctionnelle a émergé dans les années 1990 comme un nouveau paradigme reconnaissant les multiples dimensions de l'activité agricole en France. Cette conception dépasse la simple production alimentaire pour englober les fonctions économiques, sociales et environnementales assurées par les agriculteurs sur les territoires ruraux.

Les trois piliers de la multifonctionnalité agricole

La multifonctionnalité de l'agriculture repose sur trois fonctions principales :
  • La fonction économique : production de biens agricoles et alimentaires, création de valeur ajoutée et d'emplois directs
  • La fonction sociale : maintien du tissu rural, transmission des savoir-faire, animation des territoires
  • La fonction environnementale : entretien des paysages, préservation de la biodiversité, gestion des ressources naturelles

Reconnaissance institutionnelle et mise en œuvre

En France, la loi d'orientation agricole de 1999 a officiellement reconnu la multifonctionnalité à travers la création du Contrat Territorial d'Exploitation (CTE). Ce dispositif permettait de rémunérer les agriculteurs pour leurs services non marchands rendus à la société. Entre 1999 et 2002, plus de 49 000 CTE ont été signés, représentant un engagement financier de 710 millions d'euros.

Évolution du concept

Après la suppression du CTE en 2002, la notion de multifonctionnalité s'est progressivement effacée des politiques agricoles françaises. Elle réapparaît néanmoins dans la loi d'avenir pour l'agriculture de 2014, mais uniquement appliquée au secteur forestier. Cette évolution témoigne d'une transformation profonde dans la conception du rôle de l'agriculture sur les territoires ruraux.

Données chiffrées sur la multifonctionnalité

Période Dispositif Nombre de bénéficiaires
1999-2002 CTE 49 000 exploitations
2000-2002 Budget annuel 236,7 millions €

Les politiques publiques de soutien à la multifonctionnalité

Les politiques publiques de soutien à la multifonctionnalité
Les politiques de soutien à la multifonctionnalité de l'agriculture en France ont connu plusieurs évolutions majeures depuis les années 1990, avec la mise en place de dispositifs visant à rémunérer les fonctions non marchandes des activités agricoles.

Le Contrat Territorial d'Exploitation (1999-2002)

Le CTE, instauré par la loi d'orientation agricole de 1999, constituait le principal instrument de reconnaissance de la multifonctionnalité des exploitations agricoles. Ce dispositif permettait aux agriculteurs de contractualiser avec l'État pour 5 ans en s'engageant sur un projet global intégrant des objectifs économiques, sociaux et environnementaux. Entre 1999 et 2002, 49 368 CTE ont été signés pour un montant moyen de 44 500 € par contrat. Le budget total s'est élevé à 2,19 milliards d'euros.

Les raisons de la suppression du CTE

Plusieurs facteurs ont conduit à l'abandon du CTE en 2002 :
  • La complexité administrative du dispositif
  • Son coût budgétaire élevé
  • Le manque d'adhésion des organisations professionnelles agricoles
  • L'alternance politique de 2002

Les Mesures Agro-Environnementales et Climatiques (MAEC)

Les MAEC, financées par le second pilier de la PAC dédié au développement rural, ont pris le relais. Ces mesures rémunèrent les agriculteurs pour des pratiques favorables à la durabilité environnementale. En 2023, le budget des MAEC s'élève à 411 millions d'euros par an en France. Les contrats MAEC concernent principalement :
  • La préservation des prairies
  • La réduction des intrants
  • Le maintien des infrastructures agroécologiques

Les dispositifs complémentaires

D'autres instruments soutiennent la multifonctionnalité des exploitations agricoles :
  • Les aides à l'installation des jeunes agriculteurs (150 millions €/an)
  • Le paiement pour services environnementaux (PSE) expérimenté depuis 2019
  • Les programmes LEADER pour le développement local (687 millions € sur 2014-2022)

L'agriculture multifonctionnelle en zones périurbaines

L'agriculture multifonctionnelle en zones périurbaines
L'agriculture périurbaine se développe aux franges des villes, dans des territoires sous forte pression foncière. Les géographes définissent ces espaces comme des zones de transition entre ville et campagne, où l'activité agricole doit composer avec l'extension urbaine. Cette agriculture remplit de multiples fonctions économiques, sociales et environnementales.

Les caractéristiques de l'agriculture en zone périurbaine

Les espaces agricoles périurbains présentent des contraintes particulières liées à leur localisation. L'European Environment Agency indique que 25% des terres agricoles françaises sont situées à moins de 30 km des grandes agglomérations. Ces exploitations font face à des coûts fonciers élevés et à un morcellement des parcelles dû à l'urbanisation. En Île-de-France, les programmes agri-urbains permettent de préserver et valoriser ces terres agricoles. Le programme de la Plaine de Versailles mobilise 52 communes sur 24 000 hectares. Les agriculteurs développent des circuits courts et des services de proximité : vente directe, cueillette, animations pédagogiques.

Services environnementaux et sociaux

Ces exploitations périurbaines rendent des services écologiques majeurs : maintien d'espaces ouverts, préservation de la biodiversité, gestion des eaux pluviales. À Rennes Métropole, 40% de la surface est classée en zone agricole protégée pour garantir ces fonctions.

Le lien social ville-agriculture

L'agriculture périurbaine crée du lien entre urbains et ruraux via:
  • Les AMAP (Associations pour le Maintien d'une Agriculture Paysanne)
  • Les jardins partagés et familiaux
  • Les fermes pédagogiques
  • Les marchés de producteurs
Les données de la SAFER montrent que 85% des exploitations périurbaines pratiquent la vente directe, contre 20% en moyenne nationale. Cette proximité avec les consommateurs urbains favorise les circuits courts et la diversification des activités.
Type d'activité Part des exploitations périurbaines concernées
Vente directe 85%
Accueil pédagogique 35%
Production d'énergie 12%

La diversification des activités agricoles sur le terrain

La diversification des activités agricoles sur le terrain
La diversification des activités agricoles constitue une réalité économique majeure pour les exploitations françaises. Les agriculteurs développent des activités complémentaires qui renforcent leur ancrage territorial tout en générant des revenus additionnels.

Les différentes formes de diversification sur le terrain

La transformation à la ferme et la vente directe représentent 25% du chiffre d'affaires des exploitations diversifiées en 2024. Les ateliers de transformation permettent de valoriser les productions : fromageries, conserveries, ateliers de découpe. La vente directe se structure autour des marchés de producteurs, AMAP et magasins de producteurs qui maillent les territoires ruraux. L'agritourisme se développe avec 12 000 agriculteurs proposant des hébergements (gîtes, chambres d'hôtes) et des activités pédagogiques. Les prestations sociales progressent également : accueil thérapeutique, insertion par l'activité agricole.

Production d'énergie renouvelable

Le photovoltaïque agricole génère des revenus complémentaires significatifs. Une installation de 500m² sur un bâtiment d'élevage permet d'économiser 80 000 euros sur 20 ans. La méthanisation agricole compte 1 200 unités en fonctionnement, valorisant les effluents d'élevage.

Cadre réglementaire et dispositifs de soutien

Les Mesures Agro-Environnementales et Climatiques (MAEC) accompagnent financièrement les fonctions environnementales : 211 millions d'euros en 2024 pour 23 000 contrats. La définition légale italienne de l'agriculture, transposée en droit français, reconnaît explicitement les activités secondaires et tertiaires comme partie intégrante du développement rural durable. Les exploitations diversifiées bénéficient d'avantages fiscaux : crédit d'impôt bio, exonération de taxe foncière pour les activités agritouristiques, TVA réduite sur la vente directe. Le statut d'agriculteur permet également de conserver la protection sociale agricole pour ces activités annexes.

L'essentiel à retenir sur l'agriculture multifonctionnelle en France

La reconnaissance de l'agriculture multifonctionnelle continue de progresser avec de nouveaux dispositifs de soutien. Les enjeux futurs concernent notamment l'adaptation au changement climatique, la protection des terres agricoles périurbaines et le développement des énergies renouvelables sur les exploitations. Le renforcement des circuits courts et des liens ville-campagne constituera également un axe majeur.

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